Conférences,  Humanités créoles

FEMME FEUILLE, SANTE ET PLANTES

9 Mai 2023
FEMME FEUILLE.
Bonjour Mesdames et messieurs
Dans le cadre de la caravane de la santé, j’ai le plaisir d’être invitée par le Lyon’s club pour présenter une contribution à une cause qui se décline aujourd’hui à l’échelon mondial. Dans les limites planétaires qui ont été récemment défini par des scientifique. En effet, la santé figure parmi l’une d’elles. Les pollutions chimiques de l’air de notre planète ont entrainé la disparition de 7 millions d’humains, c’est dire que la santé est un défi mondial auquel nous devons répondre. En tant que marqueur de paroles ou d’écrivaines, il convenait que les préoccupations liées à ce sujet soient présentés dans mes écrits.
C’est à travers un personnage de mon dernier livre, Nuits Intégrales Prix Pan Amazonien Caraïbes que la question de la santé et sa préservation se font jour. Notre culture d’Afro –descendants n’est pas sans incidence sur la manière dont nous abordons cette question. Aussi ais-je choisi de projeter dans un raccourci singulier que le conte et le roman autorisent, de faire coexister chez une seule et même personne la question de la santé en hyper modernité et dans les époques du passé. Un personnage nommé Yanis professeur de sciences de la terre et du vivant, montre à ses élèves en 2021, en période de Covid, la nécessite de protéger la biodiversité car son équilibre est garante de notre bien-être et de notre santé, il est néanmoins à son corps défendant, hanté par deux présences féminines. L’une dont la rencontre fortuite, lui permet d’entrevoir un monde sous-marin insoupçonné et témoignant d’une avance technologique certaine et l’autre rencontre est dans ces rêves lors de la pleine lune, celle d’une probable aïeule, une femme-feuille évoluant dans une habitation de l’Amazonie au début du 19°siècle. Si nous savons ce qu’est un professeur, nous ne savons rien du métier de Femme feuille dans une habitation coloniale pendant l’esclavage. Cette personne initiée au soin par les plantes, avait la lourde tâche de veiller au bien être de la communauté composée tant des esclaves que des maîtres. Dans ces hauteurs boisées dans lesquelles, nuls médecins de marine ne se hasardaient. Les colons livrés à eux-mêmes étaient forcés de reconnaître la qualité et la fiabilité des soins et savoirs ancestraux des Bossales et Afro descendants qui travaillaient sur leurs terres. Le texte à cette occasion montre l’importance et les techniques de transmissions de ces savoirs, le choix de celle ou de celui qui poursuivrait la tâche et qui était dépositaire du corpus de connaissances n’était pas laissé au hasard. La formation de ces personnes pour apprendre et reconnaître les plantes, les usages et les traitements faisaient partie de rites, de rituels et d’habitus qui avec le temps sont tombés en désuétude nous privant aujourd’hui d’un ensemble de connaissances botaniques et plus largement environnementale propre à maintenir la santé sinon à la rétablir. Ainsi très tôt, nos sociétés avaient compris l’importance de la santé mais également de l’alimentation et avaient des postures soignantes et préventives. Le champ large de l’utilisation des plantes aussi bien pour les soins de la naissance que pour ceux attachés à la fin de vie montre que l’origine de ces savoirs est attaché tant à l’Africanité qu’à l’Améridianité. Le vaste champ d’interventions que présentaient la vie dans l’habitation permettait la structuration de cette fonction de gardien ou gardienne de la santé qu’assumaient les guérisseurs ou guérisseuses ainsi que les frotteuses. Dès l’enfance celui ou celle qui avait été sélectionné devait acquérir la capacité de reconnaissance des plantes, les techniques de préparation des onguents et décoctions mais également connaître le corps humain. Les apprenants devaient tôt se familiariser avec les mystères de la naissance et ceux de la mort ainsi que les plantes qui étaient de rigueur pour ces évènements. L’apprentissage long et exigeant, s’il a été accepté sans difficultés pendant la période de l’esclavage, l’abolition et le délitement de la vie sur l’habitation ont sonné le glas de la transmission, le phénomène de l’En-ville entre la fin du 19° et le début du 20° siècle a été également à l’origine d’une seconde limite, celle de la disponibilité proche des plantes. Les sachants ne trouvant plus de jeunes, ne transmettaient plus que parcimonieusement leurs savoirs, avant de se taire emportant dans la tombe un certain nombre de connaissances. Le discrédit final est survenu lors de l’apparition des PMI avec les discours méprisants à l’égard des plantes et la stigmatisation des « rimèdes raziés ». Néanmoins chez nos voisins de la Caraïbes, nécessité faisant loi, l’usage de la pharmacopée avait été remis à l’honneur. Les herboristeries ayant fermées dans les départements français, il ne restait plus qu’à s’en remettre totalement aux médecines modernes. Je profite à cette étape de ma présentation pour insister sur le fait que dans notre époque d’hypermodernité où la mèdecine utilise des méthodes à l’extrême pointe de la technologie, il n’est pas question de se priver de cette opportunité de se soigner, mais plutôt, en harmonie avec un biotope, une biodiversité et un contexte environnemental de préserver la santé par les usages populaires des plantes médicinales de nos espaces. Des chercheurs Suédois chargés de déterminer les limites planétaires, rappellent que la pandémie subie dernièrement est en lien avec les multiples déséquilibres de la planète qui ont atteint des seuils désormais irréversibles. La biodiversité est affectée, et plusieurs espèces de la flore de nos contrées sont en régression constante, voire en simple disparition. Un exemple, il existe aux Antilles Guyane une liane nommée « liane vermicelle » ou « sans pieds » il s’agit d’une plante parasite de couleur orange qui était présente sur les arbustes en bordure de route. Elle est utilisée en thé pour soigner les poumons notamment quand ils présentent du liquide. Tant pour des raisons d’urbanisation, que pour l’élargissement des routes voire pour un remplacement des bosquets bordant les axes routiers avec des végétaux exotiques, ces buissons porteurs de la liane sont détruits ainsi que la liane elle-même. Certes, elle n’est pas encore éradiquée mais sa présence de plus en plus discrète prive ceux qui savent, d’un usage préventif et thérapeutique avéré. Bien d’autres cas similaires peuvent être cités aux Antilles et en Amazonie Guyanaise.
Que reste-t-il aujourd’hui de ce savoir jadis maîtrisé par nos ancêtres, les bossales puis les Afro descendants ? La masse de connaissances qui nous reste, serait de l’ordre des 45% . Heureusement grâce à la collaboration dans la Grande Caraïbe et l’Amérique du sud des chercheurs en ethno botanique et en ethno pharmacopée un vaste programme a été mis en place pour retrouver et rassembler les éléments épars de ce savoir. Il s’agit du programme TRAMIL qui a pu retrouver quelques-unes des plantes et les usages attachés à celles-ci, dans le domaine du maintien de la santé où de son rétablissement grâce à une collaboration inter îles et continents. L’île de Cuba a ce titre à joué un rôle de pionnière et a apporté une bonne contribution dans le recensement des plantes. Les ouvrages de Tramil ont trouvé dans la fin du 20° siècle un accueil favorable dans les populations des iles et du continent. L’une des raisons des réticences des populations des DEFA à l’emploi massif du vaccin lors de la dernière pandémie loin d’être simplement le fait d’un aveuglement ou d’une posture ignarde, s’explique peut-être, par ce réflexe de l’usage des plantes traditionnelles venu des profondeurs du transgénérationnel, pour maintenir le corps de façon préventive dans un état de santé ou de résistance. Curieusement une partie de l’Afrique a eu elle aussi le réflexe de se tourner vers les plantes des biotopes présents. Au regard de ces observations, loin de ne tirer qu’un bilan négatif de cette douloureuse expérience subit par la planète, il semblerait que la pandémie ait eu le mérite de réconcilier les populations Antillo-Guyanaises et plus largement Caribéenne avec leur patrimoine floristique, la connaissance de ses vertus et surtout de comprendre la nécessité de protéger ce patrimoine d’une disparition liée à la présence de pesticide ou autre fauchage intempestif. Il convient également de se souvenir que les médicaments qui sont dans les pharmacies sont souvent réalisés à base de molécules de plantes lesquelles sont dupliquées chimiquement. Les brevets récupérés par les grands laboratoires pharmaceutiques dans ces occasions et les pactoles réalisés interpellent. Chacun étant le garant chez soi de la sauvegarde des variétés floristiques, une prise de conscience et des efforts doivent être consentis par chacun et le sont par les autorités locales. Aujourd’hui bon nombre d’entre nous, disposons de quelques plantes médicinales et nous tentons laborieusement de combler les lacunes de nos connaissances en nous informant des vertus de telle ou telle plante auprès des personnes âgées, qui sont nos dernières bibliothèques. Il est important de convenir que dans ce domaine, les ouvrages réalisés par des chercheurs patentés délivrent en même temps que les noms vernaculaires et latins des plantes, les doses à prendre. Il s’agit là de réels compléments d’informations garants de la sécurité d’usage des plantes.
L’Office Mondial de la santé a révélé dans son rapport que la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane étaient impactés fortement par les maladies transmissibles par les moustiques. Dengues Zika Chikougounia dans cette seconde partie de mon exposé je vous présenterai le tableau des maladies qui selon la Haute Autorité de Santé sont les plus courantes dans nos contrées. J’en profiterai pour proposer des plantes qui consommées à titre préventif permettent de maintenir le corps en santé et tout au moins de disposer d’éléments de résistance.
Maladies fréquemment rencontrées aux Antilles Guyane
Maladies Agent infectieux Moustique
ZIKA X
DENGUE X
CHIKOUNGOUNIA X

Cette haute autorité précise que les cardiopathies Ischémiques ainsi que le diabète sont en augmentation depuis l’année 2000. Il en va de même des accidents cardio-vasculaires cérébraux, des broncho pneumopathies chroniques obstructives. Par ailleurs les cancers, les maladies rénales, les syndromes fébriles inexpliqués ainsi que les hépatites B et C, constituent des compléments à ce tableau relatif aux maladies souvent rencontrées dans nos départements. Il faut ajouter à ces éléments la présence de maladies entériques. Les données présentées sont celles recueillies dans les articles rédigés par les chercheurs de Guadeloupe, Martinique et Guyane il s’agit de Chaud Pascal, Bezali Pierre, Alain Blateau, Irisa Rémus et l’ Institut Pasteur de Guyane
Ces maux graves nécessitent un suivi médicale mais n’excluent pas pour autant une approche plus large voir holistique de la personne affectée de sorte que des liens soient établis et des réponses sur plusieurs points soient apportées avec le but de rétablir un équilibre qui pour de multiples raisons a disparu.
Pour conclure nous avons noté à la suite d’une brève enquête le nom de plantes qui répondaient à des maux plus courant qui affectent nos populations, l’une des réponses plusieurs fois données, porte sur l’obésité liée à une alimentation mal régulée, avec comme remédiation un diurétique la feuille bol d’eau dont le nom latin est Polyscias Scutellaria, cette feuille a par ailleurs des vertus cosmétiques avérées. Voici dans ce tableau les autres éléments recueillis.
La nature, recèle plus de secrets à notre service que nous ne saurions le concevoir. Sachons la protéger pour qu’à son tour elle nous protège dans une symbiose parfaite.

Maladies Nom vernaculaire Nom Latin
Ballonement Thym Plectranthus amboinicus
Diverticule Thym, menthe poivrée Thimus, mentha piperita
Asthme Madlomin Euphorbia hirta
Dengue Corona Zeb a pik Neurolaena lobata
Grippe courbature Atoumo Alpina Zérumbet
Immuno déficience Moringa Moringa Oleifera
Papaye Canica Papaya
Corona Liane de Cayenne Tinospora crispa
Couachi Quassia Amara
Armoise Artemisia
Armoise Africaine Artemisia vulgaris
Paludisme Armoise Artemisia Annua
A titre d’information, les doses doivent être respectées, il convient de se tourner vers les ouvrages consacrés, entre autres exemples : Tramil.
Merci pour votre attention
Dr Myrtô RIBAL